Keltois du clan des Drunes


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Introduction


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Il est des secrets qui se perdent à l’instant où le temps des légendes rencontre l’histoire des Hommes. Tout comme celle des Sessairs, l’histoire du clan des Drunes est difficile à retracer, tant il est ardu de faire la part des choses entre le mythe et la réalité. L’origine du conflit qui oppose aujourd’hui ces clans est confuse, même s’il est certain que celle-ci est liée au destin tragique de Cernunnos.

Après que Elhad, fils d’Avagd, roi de la tribu de Kel, se soit uni à Danu et que la déesse ait mis ses trois filles au monde, la paix revint sur cette terre qui appartenait désormais à la fois aux enfants de la déesse et aux hommes de Kel. Lors de la seconde bataille de Kel An Tiraidh, Avagd fut tué. Son fils prit sa place sur le trône et pour preuve de sa fidélité envers Danu, il abandonna son ancien nom et garda celui sous lequel il s’était présenté à elle : Cernunnos, le Beau Cornu.

Ce qu’il advint par la suite, rapporté dans les légendes Sessairs, est si étrange que cela évoque plus sûrement une représentation symbolique de la réalité que la réalité elle-même.

Lahn, le dieu du soleil, fut jaloux de Cernunnos et de l’amour que Danu lui portait. Il en conçut une rancœur si profonde qu’il se scinda en deux êtres. L’un reconnaissant à Cernunnos d’avoir ramené la fertilité sur sa terre, l’autre habité d’un désir de vengeance qui ne connaîtrait aucune limite. Ce dernier prit corps en la personne de Scâthach, l’Ombreuse. La nuit et les ténèbres venaient de naître sur un monde qui jusqu’ici n’avait connu que le jour.

Et Scâthach mena Cernunnos à sa perte. Elle le trompa et l’ensorcela pour lui faire perdre à la fois l’estime des siens et l’amour de Danu. Elle manoeuvra tant et si bien qu’elle finit par le pousser à s’enfuir de Kel An Tiraidh.

La disparition de leur roi raviva la colère de certains Keltois qui pensèrent avoir à nouveau été joués par les dieux. Mais les Druides refusèrent de rompre une paix si chèrement acquise et la majorité des hommes de Kel choisirent de rester fidèles à Danu. Les autres, décidés à retrouver leur roi, quittèrent Kel An Tiraidh avec leurs familles et prirent le nom de Drunes. Ce terme pourrait se traduire dans la langue des Keltois par « clairvoyant », dans le sens de celui qui ne se laisse pas abuser par le mensonge.

La légende prétend que Scâthach trompa à nouveau les Drunes. Elle envoya ses enfants démoniaques qui se firent passer pour des Hommes et massacrèrent leurs femmes et leurs enfants. Puis ces mêmes démons vinrent trouver les survivants et les persuadèrent que tout ceci était le fait des dieux qui, avec la complicité des Druides, avaient fait disparaître leur roi et cherchaient maintenant à se débarrasser d’eux de peur qu’ils ne retrouvent Cernunnos. Dans leur douleur, les Drunes se laissèrent abuser et se réfugièrent dans les bois pour préparer leur vengeance et le retour de Cernunnos.

Toute cette histoire, pour peu vraisemblable qu’elle puisse paraître, traduit certainement une réalité à peine voilée.

Les véritables raisons de la scission des hommes de Kel trouvent sans aucun doute leurs origines dans un conflit concernant l’accession à la royauté. Il est plus probable que les Drunes aient été les partisans d’un roi déchu, victimes des exactions des nouveaux maîtres de Kel An Tiraidh et forcés à l’exil.

Une chose cependant parle en faveur d’une implication des dieux. Les Formors, les alliés démoniaques des Drunes, ne sont pas une invention des mythes Keltois. Se pourrait-il ainsi qu’ils soient réellement les enfants maudits engendrés par Scâthach pour servir sa vengeance ?


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Ceux qui voient les Ombres


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Les Drunes sont un peuple plus secret et mystérieux encore que les autres Keltois. Car si les contacts entre le Royaume d’Alahan et les tribus Sessairs sont fréquents, bien peu peuvent se vanter d’avoir pu approcher les Drunes. Plus précisément, peu sont encore en vie pour rapporter ce qu’ils ont vu. Il est cependant possible d’appréhender leur mode de vie et leurs coutumes, car à la différence des autres clans Keltois, les Drunes ont recours à l’écriture. Beaucoup de fragments de textes ont été retrouvés sous forme de parchemins, de tablettes de bois, d’argile ou encore sur les parois de grottes visitées par les Drunes.

Nombre de lettrés se sont attachés à leur étude et ont recoupé leurs travaux pour enfin parvenir à une conclusion étonnante. Ces écritures ne relatent ni l’histoire du peuple Drune, ni de quelconques légendes.
Certes, des allusions à des événements passés sont présentes, mais dans leur ensemble, ces textes participent d’un seul et même tout que les théologiens d’Akkylannie désignent sous le nom de « Gnose ». Il s’agit, ni plus ni moins, de la philosophie qui décrit le rapport des Drunes au divin. Ces écrits constituent ainsi à la fois le mode de pensée auquel le Drune doit se référer tout au long de sa vie, ainsi qu’un message adressé aux dieux et aux hommes qui les servent.

L’étude de la Gnose a permis de définir les grandes lignes de la société Drune. Il est intéressant de noter, en tout premier lieu, que leur schéma social se trouve totalement à l’opposé de celui des Sessairs. Bien moins nombreux que les Keltois de la plaine, les Drunes ont dû, depuis la naissance de leur clan, se montrer unis pour survivre au coeur d’un environnement particulièrement hostile. C’est pourquoi, alors qu’il existe des dizaines de tribus Sessairs éparpillées en Avagddu, la population Drune est concentrée en un seul et unique endroit : Drun Aeryfh, la Cité Invisible.

De même, les Drunes ne reconnaissent qu’un seul et unique roi : Cernunnos lui-même. Et nul autre que lui ne peut prétendre à ce titre. Ainsi, tant que leur roi mythique ne sera pas revenu parmi eux, ce sont les Wyrds, une caste de dignitaires de grand pouvoir, qui régissent les affaires du clan. Les Wyrds sont nombreux et chacun d’eux se voit confier des responsabilités bien précises. L’écriture de la Gnose - que les Drunes nomment quant à eux Abrahd an lyfh Scâthach, « le Livre de Ceux qui Voient Parmi les Ombres » - l’éducation des jeunes et la régulation des naissances comptent parmi leurs attributions.

Mais les Wyrds eux-mêmes tiennent leurs ordres d’une instance supérieure : les Seigneurs Wyrds. Ce conseil est constitué de sept Wyrds, du grand prêtre de la nécropole ainsi que d’un neuvième et mystérieux personnage chargé de désigner les huit autres. Ce dernier vit à l’écart de la cité troglodyte, en un endroit de la forêt que les autres Drunes eux-mêmes n’osent pas approcher. Et il ne paraît parmi les siens que lorsque le temps est venu de les mener à la guerre.

Toute l’organisation sociale du clan est axée autour de l’application de la Gnose. À cette fin, toute manifestation d’individualisme est radicalement proscrite. La recherche d’une quelconque satisfaction personnelle, l’amour et l’amitié ne doivent en aucun cas entrer dans les préoccupations d’un Drune. Celui-ci ne doit s’attacher ni à son existence ni à celle de son prochain. À ce titre, les relations entre hommes et femmes sont strictement contrôlées et il est interdit à une femme d’être liée à un seul homme.

De même, rien dans les activités quotidiennes de chacun ne revêt de caractère accessoire. L’artisan façonne les armes de la victoire et la quête de nourriture entre pour une part importante dans l’accomplissement de la Gnose. Ceci explique d’ailleurs l’un des aspects les plus terrifiants des usages en vigueur chez les Drunes : l’anthropophagie.

Car il est dit que pour s’affranchir totalement du joug des dieux, le Drune doit s’attaquer à la source de leur pouvoir sur Aarklash : les croyants. Car l’influence d’un dieu sur ce plan de la réalité dépend de la ferveur de ses Fidèles. C’est pourquoi les Drunes s’emploient à tourmenter et affaiblir les divinités en infligeant les plus grandes souffrances à leurs serviteurs. Au terme de ces rituels au cours desquels les captifs sont torturés de la plus horrible manière qui puisse être imaginée, les Drunes consomment la chair de leurs victimes. Par cet acte, ils détruisent totalement et de manière irréversible leur ennemi et empêchent son âme de servir les desseins des dieux.

Les Drunes sont peu nombreux, Caer Maed n’abrite tout au plus qu’une centaine de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants. Mais ils ont conclu un pacte avec de puissants alliés : les Formors. Nul ne sait réellement d’où ont surgi ces démons, ni les raisons de leur présence sur Aarklash. Les légendes Sessairs les présentent comme l’engeance maudite de Scâthach et les instruments de sa vengeance contre les Sessairs. Selon d’autres sources, ils auraient effectivement été engendrés par la déesse sombre, mais celle-ci les aurait reniés et abandonnés, d’où la raison de leur présence aux côtés des Drunes dans leur combat contre les dieux.

Mais qu’ils manipulent les Drunes ou qu’ils partagent véritablement leurs vues, la menace qu’ils représentent pour les autres peuples d’Aarklash est belle et bien réelle.


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Les Ténèbres Véritables


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La vie des Drunes est exempte de tout espoir. La Gnose leur inculque que seuls ceux qui naîtront sous le règne de Cernunnos pourront aspirer à une vie heureuse. Les autres ne sont que les instruments de la lutte contre les dieux et leur vie n’a de valeur que dans la mesure où elle sert les desseins du clan.

De même, les rares contacts entre les Drunes et les autres peuples d’Aarklash sont exclusivement orientés vers l’accomplissement de leur quête.

Sous l’influence des Formors, ils se sont tournés vers les Ténèbres. Ceci se passa bien avant l’avènement de la Baronnie Maudite, bien avant que Dirz l’hérétique ne fuie vers Syharhalna et que les Nains de Mid-Nor n’émergent de leur gouffre.

Depuis des siècles, les Drunes ont observé les autres peuples tombés sous l’emprise des Ténèbres avec un certain mépris. À leurs yeux, ceux-là n’ont renié leurs anciens dieux que pour être asservis par de nouveaux. Néanmoins, ils continuent d’entretenir des liens avec certains d’entre eux.

La Baronnie d’Achéron leur fournit des gemmes de Ténèbres, dont les Formors font grand usage. En échange, les Drunes confient les cadavres de leurs victimes aux bons soins des Nécromanciens du Bélier.

Les Drunes ont également suivi de près l’apparition des serviteurs du Despote. Intrigués par ces êtres qui portent en eux une parcelle de leur dieu, ils se sont alliés à eux, tout autant pour se prémunir des peuples de l’est que pour en apprendre plus sur la nature profonde de ceux qu’ils combattent.

Le seul peuple avec qui les Drunes ont noué une véritable alliance autour d’un intérêt commun n’est pourtant pas soumis aux Ténèbres. Les Dévoreurs, tout comme les Drunes, ont pris conscience du cynisme et de l’hypocrisie des dieux. Les uns comme les autres sont prêts à commettre les pires atrocités pour annihiler toute influence divine sur Aarklash.


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Les Bois Noirs


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Pour la plupart des peuples d’Aarklash, la forêt de Caer Maed est connue sous le nom de Bois Noirs. Les immenses sapins aux larges aiguilles d’un vert très foncé étendent leurs branches touffues jusqu’à dissimuler totalement le ciel. La pénombre qui règne ici justifie le nom de ces bois tout autant que leur sinistre réputation. Dans de telles conditions, la végétation au sol est rare. Le sous-bois est recouvert d’un épais tapis d’aiguilles sèches, de pommes de pins et de branchages.

Dans sa partie nord, la forêt est traversée d’est en ouest par le Mur des Géants, la falaise qui sépare la plaine d’Avagddu du plateau de No-Dan-Kar. Mais il ne s’agit pas là de la seule irrégularité du relief de ces lieux. La forêt est balafrée en plusieurs endroits par des crevasses plus ou moins profondes et de petits surplombs de roche calcaire parsemés de grottes et de souterrains naturels.

Au milieu de la forêt se dresse le Mont Silence, une montagne peu élevée mais dont la base s’étend sur plusieurs kilomètres. Cet endroit est le coeur et l’âme du clan des Drunes, car sous la surface s’étend Drun Aeryfh, la Cité invisible.

Dès les premiers temps où ils se réfugièrent dans ces bois, les Drunes s’abritèrent dans ces grottes. Depuis lors, ce mode de vie troglodyte est devenu partie intégrante de leurs rites. Ainsi, même s’ils sont aujourd’hui devenus les premiers prédateurs de Caer Maed, ils n’ont pas pour autant abandonné leurs souterrains. De cette cité cachée dans les entrailles de la montagne, seuls les ponts suspendus jetés par-dessus les torrents et les trophées macabres fichés en terre trahissent leur présence. Mais pour qui s’aventure sous la surface, c’est un voyage au cœur de l’épouvante qui commence. Disposés à intervalles réguliers dans les artères les plus fréquentées, des braseros font danser des ombres inquiétantes sur les parois des souterrains. Dans cette faible lumière se dessinent les contours de scènes effroyables peintes à même la roche. Ici, le fusain et l’ocre rouge relatent de grandes batailles et les tueries qui en résultèrent. Des scènes de torture d’une incroyable cruauté y sont représentées avec une puissance évocatrice dérangeante malgré le caractère primitif de ces peintures. Mais c’est au bout de ces tunnels que les relents de mort et de souffrance qui baignent les lieux prennent leur source.

Dans le silence des nefs naturelles, les cris des suppliciés résonnent pour l’éternité. Qu’importe où se pose le regard, il n’est pas un endroit qui n’évoque les actes inhumains dont ces lieux ont été témoins. Les stalagmites maculées de sang portent encore les traces de griffures de ceux qui y furent attachés. Des ossements humains jonchent le sol en témoignage des horribles festins qui se sont déroulés ici.

C’est ici que vivent les Drunes et que meurent leurs ennemis.

Plus au sud, dans le prolongement de Drun Aeryfh, s’élève une autre colline. Un peu moins haute que le Mont Silence, elle est également creusée de nombreux boyaux et salles souterraines. Mais les vivants sont rares en ce lieu. Ici reposent les Mânes, les corps momifiés des habitants de Drun Aeryfh. Ici s’étend Gwyrd An Caern, la nécropole Drune.

Le rapport des Drunes à la mort est conflictuel. Car lorsque l’âme quitte le corps, elle quitte également le plan de la réalité des mortels pour tomber entre les mains des dieux. C’est pourquoi les Drunes embaument leurs morts et pratiquent une forme spécifique de Nécromancie qui vise à empêcher l’âme d’un être de quitter complètement son corps. Ainsi, au coeur de Gwyrd An Caern, les morts ne reposent pas en paix, ils attendent leur heure…


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