Orques du Béhémoth


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Introduction


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Après s’être échappés de Shamir, certains orques ne voulurent pas rester dans les canyons arides du Bran-Ô-Kor et continuèrent leur exode, traversant les monts Aegis et la plaine des Larmes. Ils demeurèrent un temps en Avagddu, mais des tribus keltoises les prenant pour des démons finirent par les en chasser. Ils reprirent alors leur périple, en direction du sud-ouest cette fois, et se retrouvèrent dans le royaume d’Alahan. Là encore, ils ne rencontrèrent que crainte et hostilité des Lions et ils durent reprendre la route. En désespoir de cause, ils résolurent de se réfugier dans les hautes montagnes à l’ouest de la baronnie de Daneran. Ils traversèrent les cols enneigés malgré le blizzard et le froid mordant, mais ce voyage exténuant ne les mena que sur les terres maudites d’Achéron et ils durent une fois encore rebrousser chemin.

L’inéluctabilité de leur destin s’imposa alors à eux. Leur voyage s’arrêtait ici. Ils avaient quitté le sol brûlé de Bran-Ô-Kor pour ne trouver pour seule terre d’accueil que les sommets gelés de la chaîne du Béhémoth. Las de fuir, ils se résignèrent à accepter leur sort et s’établirent dans la montagne, à quelques lieues seulement de la passe de Kaïber. Nul autre que des orques n’eut sans doute pu survivre au climat de cette région. Peut-être est-ce là l’héritage génétique gobelin ? Quoi qu’il en soit, ces orques domestiquèrent la montagne et ses vents glacials, en s’accommodant d’une nourriture trop rare. La population de la tribu du Béhémoth n’a jamais dépassé quelques centaines d’individus.



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Les Gardiens des Cols


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À l’inverse des orques de Bran-Ô-Kor dont la population est scindée en une multitude de clans, la tribu du Béhémoth forme une communauté unique et soudée. Son mode de vie peut être qualifié de semi-nomade. Divers campements provisoires sont disséminés dans la montagne et sont occupés périodiquement, soit par les chasseurs qui traquent les troupeaux de cervidés, soit pour échapper à une menace.

Le col des Hurleurs est un étroit défilé situé à quelques lieues au nord de la Passe de Kaïber. Il est ainsi nommé en raison des gémissements lugubres du vent qui y résonnent à tout moment de l’année. Dans un premier temps, les orques se réfugièrent à proximité de ce col, dans des grottes ouvertes sur le flanc de la chaîne montagneuse pour échapper au blizzard.

Mais ils durent bientôt affronter une nouvelle menace.

Contournant l’inexpugnable forteresse de Kaïber, des bandes de morts-vivants tentaient régulièrement de traverser le Béhémoth par le col des Hurleurs. Pour se protéger de ces incursions, les orques entreprirent de fortifier la passe, reproduisant sans le savoir et à leur échelle rudimentaire le même dispositif défensif qu’à Kaïber.

Après des décennies de travaux ininterrompus pour renforcer ces défenses, le col est aujourd’hui barré de part en part par une solide palissade de bois flanquée de tours de guet où les orques se relaient jour et nuit pour maintenir une surveillance constante.

Au regard de la topographie des lieux, cette barrière ne représente qu’une goutte d’eau dans l’océan. En effet, la chaîne du Béhémoth est percée de bien d’autres accès que les forces achéroniennes empruntent régulièrement. Le col des Hurleurs est à la fois le plus accessible, le plus large et le plus proche de Kaïber. La présence des orques constitue donc une aubaine pour l’Alliance de Lumière que la rigueur du climat et l’inaccessibilité de ce col pendant les mois d’hiver empêchaient jusqu’à présent de maintenir une garnison permanente à cet endroit.

Les défenseurs de Kaïber ont ainsi noué des liens avec la tribu du Béhémoth afin de les aider à maintenir leur présence. Aussi il n’est pas rare que les orques reçoivent des vivres et des armes ainsi que des conseils avisés de la part des émissaires de la Lumière, qui les incitent à étendre leur contrôle sur d’autres cols. En d’autres circonstances, ces montagnards aguerris louent également leurs services pour guider les espions et les expéditions de l’Alliance à travers les montagnes pour rejoindre la baronnie d’Achéron.

Les orques du Béhémoth n’ont cependant jamais combattu directement pour les forces de la Lumière.

À plusieurs reprises, des émissaires de Kaïber ont tenté de les convaincre de participer à des opérations coordonnées, en vain. Ces orques ne sont pas des mercenaires et ils n’acceptent de coopérer avec l’Alliance que dans la mesure où l’accord ne les place pas en position de subordination vis-à-vis de leurs « voisins ».



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La tribu de Vijkhal


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Le patrimoine génétique hors normes des orques leur a permis de survivre aux rigueurs climatiques des montagnes. Les alchimistes de Dirz ne s’étaient pas trompés en misant sur les extraordinaires facultés d’adaptation du génotype gobelin. Les orques avaient été créés dans le but de mener des campagnes de conquête sur tout le continent.

Ils étaient censés résister à la chaleur écrasante du désert, au froid le plus intense ainsi qu’aux privations de nourriture, d’eau et de sommeil. En cela au moins les biochirurgiens ont atteint leur but.

Bien que les orques du Béhémoth aient évolué loin de leurs cousins de Bran-Ô-Kor, on retrouve les mêmes particularismes génétiques que chez ces derniers au sein de cette tribu. Guerriers Chacal, tueurs Amok, guerriers mystiques, tous ces archétypes sont présents, sous des appellations différentes.

Les colosses au faciès si particulier que les orques de l’Est nomment guerriers Chacal forment ici aussi une caste à part : les guerriers du vent. Coïncidence ou marque des dieux, de la même façon que les guerriers Chacal sont étroitement liés à leur divinité tutélaire, les guerriers du vent sont entièrement dévoués aux prêtres de la tribu dont ils constituent traditionnellement la garde rapprochée.

Les guerriers de pierre tiennent ici la même place que les tueurs Amok et jouissent tout comme en Bran-Ô-Kor d’un grand prestige auprès des autres membres de la tribu. Au point qu’à la différence des orques de Bran-Ô-Kor dont les chefs tribaux sont désignés par une assemblée de mystiques, la fonction de chef de la tribu du Béhémoth revient traditionnellement au plus âgé des guerriers de pierre. Celui-ci demeure ensuite à la tête du clan jusqu’à sa mort, mais il partage cependant l’exercice du pouvoir avec les prêtres, un peu à la manière des rois sessairs d’Avagddu.

La tribu du Béhémoth est aujourd’hui commandée par le chef Vijkhal le Brave. Tumahk, la Voix du vent, est le premier fidèle de la tribu et, à ce titre, le principal conseiller de Vijkhal.

Plus que jamais, les orques du Béhémoth sont sur leurs gardes, car l’esprit de Kamahru a averti Tumahk que des événements majeurs s’étaient produits à l’est et que leurs conséquences allaient ébranler l’équilibre du monde jusqu’aux fondements mêmes de la création.

Comme l’avait prédit l’arbre, le Mal s’étend de plus en plus rapidement. En conséquence, la tribu du Béhémoth a considérablement réduit ses contacts avec l’Alliance de Lumière, car les visages de la corruption sont innombrables et la tentation du pouvoir est aussi grande dans la Lumière que dans les Ténèbres.



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Les protecteurs de l’Arbre-Esprit


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Les orques des montagnes ont quitté leurs cousins de Bran-Ô-Kor bien avant que le culte de Chacal prenne l’envergure qu’il a de nos jours. Tout comme leurs semblables, ils ressentent par instinct un lien puissant avec leur terre et leur environnement naturel. C’est ainsi qu’ils se sont tout naturellement mis à vouer un culte à la montagne et à prier les esprits du vent. Les prêtres de la tribu communiquent avec ces esprits et écoutent les présages dans les murmures et les cris du blizzard.

De par ces croyances, les orques se sont arrogé, au fil des années, le rôle de protecteurs des esprits de la montagne et de leurs sites sacrés. La chaîne du Béhémoth constitue en effet l’un des endroits les plus isolés du continent et nombre de ses sommets restent aujourd’hui encore inviolés. Bien peu d’individus ont la moindre idée des mystères que recèlent ces pics enneigés et ces épaisses forêts de conifères.

De tous ces secrets, l’un d’eux révéla un jour la destinée de la tribu.

Kunjan, l’esprit du Vent du Soir, s’adressa à un prêtre nommé Kamahru et le guida au sommet de l’un des pics qui entourent le col des Hurleurs.

Il ne s’agissait ni du plus haut, ni du plus inaccessible des sommets, et sur son faîte se dressait un arbre qui n’était ni le plus grand ni le plus impressionnant de ceux de la forêt. Rien en réalité ne le distinguait d’un arbre normal, mais lorsque Kamahru posa ses mains sur son tronc, il sentit confusément qu’il se trouvait en présence de l’être le plus âgé qu’il ait jamais rencontré et qu’il rencontrerait probablement jamais.

Il s’assit alors au pied du vénérable ancien et ouvrit son esprit. Il médita ainsi des jours et des jours, sans boire ni manger, dans le froid et le blizzard. Et durant sa transe, l’arbre lui parla, dans un langage étrange fait de sensations et d’émotions. Kamahru se sentit transporté, en des lieux lointains qu’il n’avait jamais vus et surtout en des temps depuis longtemps révolus.

À de nombreuses reprises, il lui sembla toucher du doigt le mystère des dieux et de l’univers, mais toujours les secrets entrevus lui échappaient comme des flocons de neige dans la tempête.

Kamahru contempla ainsi longtemps les souvenirs de la Création.

Et il mourut.

Son corps affaibli et meurtri par les morsures du froid disparut sous un linceul de neige, mais son esprit désormais libéré des chaînes qui emprisonnent les mortels fusionna avec l’arbre. Ce fut alors comme si le blizzard qui l’empêchait de voir clairement jusqu’à présent s’était apaisé brutalement, dévoilant à son regard l’immensité de la Création. Il sentit les racines de l’arbre plonger loin sous la montagne, dans toutes les directions, sous les mers et les océans, par-delà les forêts de l’Ouest et les plaines de l’Est, jusqu’aux confins du grand désert et bien au-delà. Et par ces racines lui parvenait un flot continu d’informations, de souvenirs et d’émotions. Cet arbre était la mémoire d’Aarklash. Peut-être même en était-il l’origine.

Soudain Kamahru se sentit comme repoussé et, à contrecœur, il dût s’arracher à sa contemplation.

L’arbre lui parla alors à nouveau, le forçant à prendre conscience de l’importance de ce qui venait de lui être révélé et du danger que représentait ce secret s’il venait à tomber entre de mauvaises mains. L’arbre sentait le Mal s’étendre et ramper vers lui. Il l’atteindrait un jour et le forcerait à révéler ce qui ne devait jamais l’être.

Kamahru ne comprit pas pourquoi l’arbre les avait choisis, lui et son peuple, pour être les dépositaires de la mémoire d’Aarklash, mais il savait désormais que leur destinée serait d’en être les protecteurs.

Ce fut donc dans le langage des esprits que Kamahru délivra son message à ses frères. L’existence de l’arbre leur fut révélée, mais pas sa véritable nature, car nul mortel ne pouvait porter le fardeau d’un tel secret.

Depuis lors, le pic de l’Arbre-Esprit est l’endroit le plus sacré qui soit aux yeux de la tribu du Béhémoth.

Seuls les prêtres de la tribu et les guerriers du vent sont autorisés à s’en approcher, et ces derniers n’hésitent pas une seule seconde à éliminer tout intrus.